La Turquie à la Croisée des Chemins : Une Quête D’Équilibre Dans Un Moyen-Orient Turbulent

Renforcement de l'économie turque, synergie des financiers et crise du Moyen-Orient. Renforcement de l'économie turque, synergie des financiers et crise du Moyen-Orient.

Mise en contexte

Alors que le monde a les yeux rivés sur les tensions géopolitiques et les fluctuations du marché, la Turquie élabore sa propre stratégie, parfois en jouant selon les règles, parfois en les réinventant. Dirigée par le charismatique et controversé Recep Tayyip Erdogan, cette nation transcontinentale est à la croisée des chemins, jonglant habilement entre l’Orient et l’Occident, le passé et le futur.

Dans cet article, nous plongeons dans les profondeurs de la diplomatie économique turque, un domaine où Ankara fait preuve d’une ingéniosité sans pareil. De la dépendance chronique aux devises étrangères à l’art subtil de la manipulation des taux d’intérêt, la Turquie est un cas d’école en matière de survie économique

Et que dire de ses relations avec l’Union européenne ? Un feuilleton diplomatique où chaque épisode apporte son lot de rebondissements.

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Alors que les élections de 2024 se profilent à l’horizon, Erdogan se trouve à un carrefour. Les enjeux sont élevés, et les décisions prises aujourd’hui auront des répercussions bien au-delà des frontières turques. 

De la synergie avec des puissances mondiales aux risques potentiels liés à des acteurs comme l’Égypte et la Chine, la Turquie est sur le fil du rasoir. Géopolitique profonde a pris ce sujet à bras le corps, bonne lecture à vous. 

La diplomatie économique de la Turquie

La Turquie fait face à un défi économique majeur : sa dépendance envers les devises étrangères, principalement le dollar américain et l’euro. Cette dépendance est exacerbée par une pénurie chronique de ces devises, qui s’est aggravée ces dernières années, passant de 65-70 milliards de dollars avant la pandémie de Covid-19 à environ 100 milliards de dollars. 

L’afflux de devises provenant des exportations ne suffit pas à couvrir les coûts d’achat de biens et de services nécessaires, ce qui met la Turquie dans une position délicate sur le plan économique.

Pour surmonter ces défis, la Turquie a adopté des méthodes non conventionnelles pour stimuler son économie. Par exemple, elle a joué avec les taux d’intérêt pour maintenir une croissance du PIB entre 6 et 7 % par an. En oscillant entre un taux directeur bas et une inflation élevée, la Turquie a réussi à attirer des investissements tout en maintenant une certaine stabilité économique.

L’inflation est loin de ses plus hauts (85% d’inflation au pic…) mais elle est tout de même repartie à la hausse. Le dicton disant que l’inflation est comme du dentifrice, une fois sorti du tube, c’est difficile de le faire rentrer, est on ne peut plus vrai. 

Courbe de l’inflation en Turquie sur les 25 dernières années.

Cette approche a été largement critiquée pour son caractère non durable, elle a néanmoins permis à la Turquie de maintenir une croissance économique positive, même en période d’inflation élevée.

En ce qui concerne les relations avec l’Union européenne (UE), la Turquie se trouve dans une situation complexe. D’une part, une adhésion à l’UE pourrait théoriquement apporter des subventions versées d’environ 22 milliards de dollars, ce qui aiderait à combler le déficit en devises étrangères. 

D’autre part, une telle adhésion imposerait à la Turquie de céder le contrôle de plusieurs secteurs clés de son économie, comme l’agriculture et les systèmes énergétiques, au profit des réglementations de l’UE. Ankara est donc réticente à devenir une « seconde Pologne » et préfère maintenir une forme de coopération bilatérale distincte avec l’UE. 

Actuellement, la Turquie parvient à collecter entre 12 et 17 milliards de dollars de prêts européens, ce qui lui permet de maintenir une certaine stabilité économique sans sacrifier sa souveraineté. Quant à son entrée dans le bloc européen, les négociations sont actuellement au point mort. 

La Diplomatie Politique de la Turquie

La Turquie joue un rôle de médiateur de plus en plus important au Moyen-Orient, notamment dans les conflits entre Israël et le Hamas.

Ankara utilise sa position géostratégique et ses relations diplomatiques pour influencer les négociations et les accords de paix en jouant sur les deux tableaux. 

Elle entretient des relations avec le Hamas et, en même temps, cherche à maintenir un dialogue ouvert avec Israël. Cette position unique lui permet de servir de pont entre les parties en conflit, bien que cette médiation soit souvent vue avec scepticisme par d’autres acteurs régionaux et internationaux.

En ce qui concerne les relations avec de grandes superpuissances comme la Russie et les États-Unis, la Turquie est dans une situation délicate. D’un côté, elle est membre de l’OTAN et partage donc des intérêts de sécurité avec les États-Unis. De l’autre, elle entretient des relations économiques et énergétiques étroites avec la Russie. Sa prise de position neutre vis-à-vis du conflit en Ukraine le démontre.

Chaque année, surtout vers le mois d’août, la Turquie entame de nouvelles négociations avec la Russie sur les prix des matières premières. Cette relation bilatérale est cruciale pour l’économie turque. Ankara doit donc naviguer habilement entre ces deux puissances. La tension observée chez le président Erdogan lors des sommets de l’OTAN est souvent interprétée comme une manifestation de cette position précaire.

L’Afrique est devenue un terrain de plus en plus important pour la diplomatie politique et économique de la Turquie. Ankara voit le continent comme une source potentielle de matières premières, notamment d’hydrocarbures, qui pourraient aider à résoudre ses problèmes de pénurie de devises

Mais la Turquie soutient le mouvement des Frères musulmans en Afrique, souvent en collaboration avec le Qatar. Cette influence croissante en Afrique est perçue comme un moyen pour la Turquie de diversifier ses options diplomatiques et économiques, tout en augmentant son influence sur le plan international.

On comprend donc que la diplomatie politique turque est multidimensionnelle. Elle s’étend dans le monde entier, et maintenant de plus en plus vers l’Afrique. Chacun de ces axes présente des opportunités et des défis uniques, et la Turquie doit constamment ajuster sa stratégie pour maintenir un équilibre entre ses différents intérêts et obligations.

Les Défis et Opportunités Futurs

Les élections de 2024 en Turquie représentent un tournant crucial pour le président Recep Tayyip Erdogan et son parti, l’AKP. Erdogan cherche à consolider son pouvoir et à poursuivre ses ambitions géopolitiques et économiques. Ces élections pourraient soit renforcer sa mainmise sur le pouvoir, soit ouvrir la voie à une opposition croissante

Le résultat influencera non seulement la politique intérieure mais aussi les relations internationales de la Turquie, notamment avec l’UE et les États-Unis. Erdogan a besoin d’un mandat solide pour négocier avec ces entités et poursuivre ses projets, comme l’expansion en Afrique et au Moyen-Orient.

La synergie des actions avec d’autres acteurs est une autre dimension clé pour la Turquie. La collaboration avec des pays comme les États-Unis, le Qatar et même le Royaume-Uni pourrait être bénéfique pour Ankara. Par exemple, les investissements des fonds souverains arabes et des sociétés d’investissement de l’UE et des États-Unis ont déjà aidé la Turquie à stabiliser son économie. 

La collaboration pourrait s’étendre à des domaines comme l’énergie, la technologie et même la défense. Cependant, cette synergie doit être soigneusement calculée. La Turquie doit éviter de s’aliéner des acteurs clés tout en maximisant ses gains.

Malgré toutes ces potentialités positives pour son évolution, les risques pour la Turquie sont nombreux. L’un des plus importants est sa relation avec l’Égypte. Les ambitions d’Ankara en Méditerranée et en Afrique pourraient se heurter aux intérêts égyptiens, notamment en ce qui concerne l’accès aux hydrocarbures et au sujet du mouvement des Frères musulmans.

Une confrontation avec l’Égypte pourrait non seulement déstabiliser la région mais aussi affecter les relations de la Turquie avec d’autres pays arabes et occidentaux.

La Chine représente un autre défi. Alors que la Turquie cherche à diversifier ses options économiques, elle doit également prendre en compte l’influence croissante de la Chine dans la région, notamment à travers son initiative « One Belt, One Road« . Une synergie mal calculée avec la Chine mettrait en péril les relations de la Turquie avec ses alliés traditionnels et affecter son économie à long terme.

Conclusion

La Turquie se démarque comme un maître du jeu diplomatique, jonglant avec une habileté remarquable entre les différentes sphères d’influence et différents axes de pouvoirs.

Soyons critiques, car nous sommes à l’opposé avec l’actuelle diplomatie française. Bien que respectée, elle semble trop souvent en retrait, moins audacieuse dans ses manœuvres. Alors que la France s’appuie sur des alliances traditionnelles et des principes bien établis, la Turquie n’hésite pas à redéfinir les règles, à prendre des risques calculés et à forger de nouvelles alliances, même si elles semblent contre-intuitives.

La diplomatie, qu’elle soit économique ou politique, n’est pas un luxe mais une nécessité, surtout dans un monde en proie à des tensions croissantes et des évènements imprévisibles qui en découlent. La Turquie l’a bien compris.

Cette capacité à s’adapter et à innover en matière de diplomatie devrait inspirer d’autres pays. La question demeure : quelle nation saura le mieux s’adapter, innover, et ainsi survivre ? La réponse à cette question pourrait bien redéfinir l’équilibre du pouvoir mondial pour les décennies à venir. À méditer.

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